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L'INFIRMIER FACE AUX RECITS
D'EXPERIENCE DE MORT IMMINENTE

 
Mémoire de fin d'études en soins infirmiers réalisé par Xavier RODIER,
Institut de formation en soins infirmiers de LIMEIL BREVANNES: Promotion 1994/97

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B.- CADRE CONCEPTUEL

" Oui, j'ai raconté des œuvres grandioses que je ne comprends pas,
des merveilles qui me dépassent et que j'ignore "
Job, 42 :3

B.1.- DE LA QUESTION DE LA MORT ET DE LA VIE APRES LA MORT DANS LE TEMPS ET DANS L'ESPACE.

  Autant l'expérience de mort imminente soulève de nombreuses questions, autant son approche ne peut-être abordée que par un aspect transdisciplinaire [1, 3, 26, 33 p.32, 48 p21].

  Afin de ne pas nous perdre dans notre cheminement, nous avons donc élaboré notre cadre conceptuel de recherche sur les E.M.I. [Figure n°.2], à partir des préliminaires [48 p.43] et des bases déjà posées sur le sujet [1 p20].

 

B.1.1.- Petite histoire de la mort

B.1.1.1.- Au commencement...

  L'histoire de la conscience mort remonte à l'aube de l'humanité. Sa naissance apparaît au moment de " l'humanisation de l'animalité et de l'animalisation de l'humanité ", [5 p 129, 12 p 135].

  Il y a -25 à -7 millions d'années (M.A.), Ramapithécus se séparait du singe, faisant apparaître sur la côte Ouest de l'Afrique Australopithécus ( -7 à -1 M.A.), dont " Lucie " (-3 M.A.), retrouvée dans les glaces d'Italie, nous est un représentant. Ils font partie de la branche Homo Habilitis [5].

  Homo Erectus (-1.7 M.A. à -400 000 ans ) est une espèce différente d'Homo Habilitis mais issu d'un genre unique, il fait partie de la branche des " Homo Sapiens ". Suivi d'Homo Néenderthalis et de Cro-Magnon, d'où est issu notre espèce " Homo Sapiens Sapiens " et où apparaissent les premiers signes de rites funéraires (-250 000 ans) sous forme d'ossements enfouis et disposés de façon symbolique. Sapiens, du latin sapiense : sagesse [18].

  L'art de l'époque (voir les grottes de Lascaux) révèle, dans le choix des salles - des plus vastes aux plus petites -, leur progression - fonction de la luminosité -, leur décoration - troupeaux, mains de l'homme, outils, chasse -, leur technique - dessins en trois dimensions, reliefs, effets d'ombres, révèle un savoir symbolique, prémisse d'une tradition dont nous retrouvons les principes sur le plateau du Nil, en Egypte [5].

  Nous avons tout lieu donc de ne pas considérer nos ancêtres comme de simples primitifs arriérés mais bien comme les pères d'une tradition et d'un savoir propre à l'Homme.

  Notre civilisation est apparue il y a - 10 000 ans dans " le Croissant fertile ", sur les plateaux Sumériens dans l'actuel Moyen-Orient.

  Depuis, de tout temps et toutes époques, l'humanité vit avec la mort. Tour à tour déifiée, ritualisée, objet de culte de tous les espoirs ou d'aversion, toutes les grandes civilisations de l'histoire du monde - l'Egypte antique [4, 5, 14 p.150], les Mayas, les Aztèques, les Incas [4], la Grèce antique - et les grands peuples les Hébreux [18, 23], les Tibétains -, au travers de leurs religions et de leurs pratiques, ont vécu en voisinnage, à visage découvert, avec la mort [18].

  Depuis le début, nos ancêtres connaissaient la mort, ils connaissaient son visage, n'avaient pas peur de la regarder en face, et, ont souvent construit leurs sociétés et façonné leur culture en fonction des enseignements que leur apportait la mort.

  Certaines de ces civilisations nous sont encore hermétiques, telle l'Egypte ancienne et son culte du voyage des morts. Au point d'en avoir édifié un tombeau du nom de pyramide, symbole d'un investissement qui dépasse nos compréhensions contemporainres. Quels secrets, quelle sagesse et que savoir recèle ces tombeaux ? " Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut "... " savoir, vouloir, oser, se taire... aimer " [12 p.211], nous dit le Sphinx.

B.1.1.2.- Evolution jusqu'à nos jours.

  Objet d'une litérature innombrable [1 p.46], l'historien Philippe ARIES [2], nous brosse le rapport de notre société à la mort du Moyen-Age jusqu'à nos jours.

  Au Moyen-Age subsistaient encore quelques relations sincères de non déni avec la mort, puisque à cette époque " On ne meurt pas sans avoir eu le temps de savoir qu'on allait mourir. Ou alors c'était la mort terrible, comme la peste ou la mort subite. Normalement donc, l'homme était averti... par des signes naturels ou plus souvent encore, par conviction intime ", [2 p.18].

  L'homme meurt en société, il entamait alors ses préparatifs et attendait la mort " gisant au lit malade ", répéteront pendant plusieurs siècles les testaments. " La mort est une cérémonie publique et organisée... simplicité des rites de la mort, acceptés, accomplis, d'une manière cérémonielle certes, mais sans caractère dramatique, sans mouvement d'émotion expressif. Ainsi est-on mort pendant des siècles... La mort apprivoisée. " [2 p24].

  Au fil du temps, notre culture s'est imprégnée des discours chrétiens, et la mort de l'individu s'est trouvée confrontée à la représentation du jugement dernier, imposant par là-même, un bilan de sa vie, [2 p.41]. C'est " la mort de soi ".

  La mort de soi se transforme en " la mort de toi " à partir du XVIè siècle, où la mort se charge d'un sens érotique, associé à l'amour : se sont les portes de Thanatos et d'Eros qui s'ouvrent sur cette époque : " La mort n'est pas désirable... mais admirable par sa beauté ", [17 p.48]

  Notre société s'est transformée précipitamment par les apports de la médecine et des sciences en général depuis le XIXè siècle.

  Avec la découverte des germes, tout ce monde ne faisait plus très sérieux dans la chambre des mourants. De plus, la découverte de substances actives et de vaccins (L. PASTEUR, 1885, vaccin contre la rage. Choléra 1892, typhoïde 1896, coqueluche 1923 ainsi que le B.C.G. découvert par CALLEMETTE et GUERIN, premier vaccin contre la grippe en 1937, polio en 1955, rougeole 1968, rubéole 1969, varicelle 1973, et l'hépathite B en 1976. C'est ainsi que le dernier cas de variole a été éradiqué en 1977), ont permis aux hommes de détourner leur regard de la mort au profit d'une vie de plus en plus longue. Le combat pour la vie et toujours plus de bonheur interdit désormais la mort. Et pour mieux soigner ces mourants, il fallait les " déporter " vers des centres où les tentatives de guérison sont concentrées : les hôpitaux. Elle est devenue " la mort interdite ", [2 p.65].

  Ainsi, au fil du temps, l'homme a été " mis en tutelle comme un enfant mineur ou comme s'il avait perdu la raison " [2 p.160]. L'homme s'est vu dépossédé de sa mort, de son entourage, de son milieu de vie. Il n'est plus maître de rien. Il ne sait plus. Et quand arrive la mort même " le deuil n'est plus un temps nécessaire... il est devenu un état morbide qu'il faut soigner, abréger, effacer " [2 p.70]. La mort est devenue " Tabou ".

	C'est le triste constat que nous vivons aujourd'hui [8, 15, 16, 21, 25, 35, 39, 49] : nous, la mort, nous ne la connaissons plus. Il nous reste donc à la re-découvrir.

B.1.2.- Sciences et Croyances

B.1.2.1.- La mort et la science, rencontre

  La science ayant acquis ses lettres de noblesse, la religion nepouvait plus impunément continuer de brûler vif " les hérétiques ". C'est au XVIIIè siècle, que religion et science se sont clairement séparées. Aux scientifiques les choses de la terre et aux religieux les choses du ciel. " Chacun à sa place et tout ira bien " [2, 18, 47].

  L'homme, sous son aspect matériel (structure complexe de micro-organismes vivants), vit sous l'autorité de celui qui sait en la matière : le docteur en médecine, spécialiste incontestable de la machine organique humaine. Rien ne peut résister à la toute puissance de la médecine sur le corps malade, jusqu'au bout. Et c'est ainsi que nous en sommes arrivés au problème de l'acharnement thérapeutique et " formé à guérir (le médecin), il voit presqu'instinctivement la mort comme un échec " [8 p.15, 49], alors que le mourant lui, finit toujours par entrevoir autre chose que l'échec, mais un événement très en rapport avec la vie.

  Même ayant été Président de la République Française, Monsieur François MITERRAND face à Marie de HENNEZEL s'interroge sur ses croyances, l'au delà et le mystère de la mort [8 p.207].

  Ainsi, l'émergence en France des Unités de Soins Palliatifs, dont il fallut quele ministère chargé de la santé et de la famille donna le coup d'envoi [Annexe n°.1, Soigner et accompagner jusqu'au bout, l'aide aux mourants. Fascicule spécial n°96/32 bis, 1985], permet aujourd'hui de redonner un peu de dignité et beaucoup de sens à celui qui vit ses derniers jours [35 p.15].

B.1.2.2.- Nos croyances et nos perceptions.

  Comme nous le verrons dans le chapitre C.2.1.3.- Confrontation avec les résultats attendus, nos croyances sont fondées par nos perceptions, et c'est l'expérimentateur qui détermine notre perception du monde [48 p.45, 247 ; 38 p.50 ; 30 p.52 ; 32 p.34 ; 13 ; 35].

B.1.2.3.- Sciences et Croyances, l'indissoluble mariage.

  Puisque nos perceptions déterminent les mesures de ce que nous observons, de sorte que nos mesures (observations ou ressentis) répondent à nos expériences, nous les tenons pour vraies, alors toute nouvelle observations détermine de nouvelles mesures, que nous tenons alors pour vraies [13, 38, 48].

  Dans le cas des E.M.I., elles sont aussi tenues pour vraies par les sujets. Ainsi , les sujets doivent-ils déterminer de nouvelles mesures afin d'établir un lien entre perceptions et observations, entre expériences et ressentis, entre vécu et conscience. L'élaboration de ces nouvelles mesures (ou échelle de valeurs) peut s'avérer difficile dans le cas des expérienceurs [1, 26, 48]. Parfois cette difficulté peut prendre la forme d'untrouble de l'ajustement [1 p.314], pouvant aller jusqu'à un syndrome dépressif réactionnel. (Cf. B.5.2.2.).

B.2.- HISTORIQUE DES EXPERIENCES DE MORT IMMINENTE

B.2.1.- Scientification du discours des mourants.

B.2.1.1.-Les travaux d'Elisabeth KÜBLER-ROSS

  L'individualisation des E.M.I. a pris corps avec la parution du livre de Raymond MOODY, " La vie après la vie " en 1975 [20], permettant le développement des recherches naissantes sur le sujet.

  Mais cette recherche n'a été possible que sur la base de travaux antérieurs dont le Dr Elisabeth KÜBLER-ROSS a été le précurseur depuis les années 50. Par ses études et ses travaux, dont nul n'ignore aujourd'hui l'importance dans l'émergence des U.S.P., Elisabeth KÜBLER-ROSS a permis la scientification du discours des mourants et d'en faire une spécialité : la thanatologie, dont s'inspirent de nombreux pays dans le monde. (Il existe notamment un diplôme universitaire de soins palliatifs DUSP en France).

  L'un des aspects les plus connus des travaux de Elisabeth KÜBLER-ROSS est représenté par les 5 étapes du processus de mourir :

- La phase de déni ou négation,

- La colère,

- Le marchandage,

- La dépression,

- L'acceptation.

  Ces étapes ne sont pas forcément linéaires, ni dans un ordre particulier. Ce sont là 5 passages par lesquels peut passer le mourant, en les réalisant complètement ou non. Ce sont aussi 5 repères pour le soignat qui peut aider la personne en fin de vie à cheminer dans ce processus.

  Le Dr Kübler-Ross est venue en avril 1994 à Paris pour une conférence " Vivre pour de bon " à laquelle nous avons assisté.

  " Pour aborder l'être humaincorrectement, il faut l'aborder dans une dimension holistique : physique, émotionel, intellectuel et spirituel. " " La mort n'existe pas ", concluera-t-elle. Ce qu'elle ne cesse d'ailleurs de répeter " Ma vraie tâche... consiste à dire... la mort n'existe pas " [15 p.53].

  Aujourd'hui ses travaux sont largement diffusés et connus. Sa position d'expérienceur est bien moins connue que son apport à la thanatologie et aux soins palliatifs.

  Elisabeth Kübler-Ross, aujourd'hui agée de plus de 70 ans, vit une retraite bien méritée dans sa paisible demeure " Shanti Nilaya " (Havre de paix) où il lui arrive encore d'avoir de nombreux pensionnaires à l'occasion de ses ateliers.

  Ces ateliers sont accessibles aux professionnels de santé, aux personnes ayant une demande spirituelle face à une situation particulière. On y apprend à être nature, tel que l'on est réellement.

  Ces ateliers existent en France depuis plusieurs années dont le Dr Hervé MIGNOT, actuel président, organise l'emploi du temps en collaboration avec une quantité solidaire de nombreux bénévoles au travers de l'association Elisabeth KÜBLER-ROSS-France [Annexe n°.2].

  C'est une association " sans but lucratif, apolitique et non confessionnelle qui recherche l'amour inconditionnel comme idéal à atteindre et affirme que la mort n'est pas une fin en soi ".

B.2.1.2.- Raymond MOODY et " La vie après la vie ", ou petite histoire des E.M.I.

  En 1965, Raymond MOODY entend parler d'un psychiatre réanimé par deux reprises et qui parlait de ville de lumière, d'amour, de paix [1 p.34].

  En 1969, Professeur de philosophie, il décide d'introduire l'exemple du psychiatre ressuscité et le cas de la grand-mère d'un étudiant dans ses cours. Il recueillit plus de 150 témoignages du même type.

  Après avoir terminé ses études médicales en 1972, suite à des conférences qu'il donne, il se laisse convaincre de publier " La vie après la vie " où il propose une définition, une terminologie et unemodélisation de ces récits.

  Kenneth RING est Professeur de psychosociologie et, en 1977, fonde le premier organisme scientifique d'étude sur les E.M.I. (A.S.S.N.D.P. " The Association for Scientific Studies of Death Phenomena). Les publications du bulletin d'information auquel participe de nombreux chercheurs permettent la diffusion des résultats.

  Avec Raymond MOODY, en 1980, ils fondent I.A.N.D.S. (International Association for Near Detah Studies). Suivi par IANDS-Royaume-Uni en 1986, IANDS-France en 1987, Belgique, IANDS-Pays Nordiques, IANDS-Pays-Bas et IANDS Québec [4 p.44].

  En France, en 1983, Elisabeth EYSSERIC et Frédéric SCHMITT consacrent leur thèse de médecine aux E.M.I. [10].

  En 1984, Pierre DAYOT donne une interprétation bouddhiste tibétaine des E.M.I.[7], dans sa thèse de médecine " E.M.I. approche traditionnelle ".

  En 1987, Evelyne-Sarah MERCIER fonde IANDS-France [Annexe n°.2], sous la présidence du Pr Louis Vincent THOMAS anthropologue [48 p.48-49].

  IANDS-France se définit trois missions.

- Permettre un accueil des personnes ayant vécu une E.M.I.

- Assurer une diffusion des informations concernant les recherches sur les E.M.I. aux scientifiques et à la presse.

- Regrouper des équipes pluridisciplinaires de chercheurs de renom autour de projet d'étude rigoureux.

  1992 voit apparaître " La mort transfigurée ", importante publication, résultat de 5 années de recherches pluridisciplinaires de IANDS-France, sous la direction de Evelyne-Sarah MERCIER. Cet ouvrage est préfacé par Edgar MORIN et postfacé par Louis-Vincent THOMAS.

  En 1993, Didier AMMAR produit un important travail de recherche sur les expériences de mort imminente dans sa thèse de doctorat en médecine. Par une approche clinique, il propose une définition des E.M.I. par l'échelle d'évaluation clinique de Greyson [7 p16]. Il en établi leur cadre nosologique et leur intérêt thérapeuthique.

  En 1966, Marc-Alain DESCAMPS, Pr de psychosociologie à l'université René Descartes de Paris et membre du laboratoire de bioéthique de la même université, prend la tête de la présidence de IANDS-France.

B.3.- INDIVIDUALISATION ET RECHERCHE SUR LES E.M.I.

B.3.1.- Les états de conscience modifiés.

  La conscience est la perception que l'on a de soi-même et de l'environnement à l'état de veille.

- Cette conscience peut être modifiée par divers états physiologiques naturels : le sommeil, la concentration, le rêve, la peur, le stress, la souffrance ou bien encore, l'acte sexuel tout simplement [1, 11, 21, 28].

- Les états de consciences modifiés pathologiques : maladies neurologiques (maladie d'Alhzeimer, maladie de Huntington), traumatismes crânio-cérébraux.

- Les états de conscience modifiés induits :

- Par des substances :

- pharmacologiques (psychotropes, anesthésiques, produits morphiniques...),

- par des drogues (morphine, LSD, cocaïne, marijuana...),

- Par des pratiques :

- Méditation, prière,

- Relaxation, sophrologie,

- Sport (nécessitant une haute concentration).

  Plusieurs théories de la conscience sont apparues ces dernières années (théorie holographique du Dr Karl PRIBRAM [1 p.390], théorie de la conscience superlumineuse du physicien Régis DUTHEIL [48 p.217], théorie du champ unique de la conscience du psychologue Alain BREMOND [34 p.28], etc.

B.3.2.-Hypothèse étiologiques des E.M.I.

  " Actuellement, aucune hypothèse neurophysiologique, psychologique ou psychopathologique ne permet de résumer simultanément l'ensemble des aspects sémiologiques de l'expérience de mort imminente et ou l'ensemble de ses conditions cliniques de survenue.

  Loin d'être antinomiques, ces hypothèses semblent refléter les différents " niveaux " de réalité de ces expériences.

  L'introduction des paradigmes physiques de la conceptualisation du réel et de l'espace temps, dans le champ des neurosciences et leur équivalent psychologique qu'est la physiologie transpersonnelle annonce peut-être un virage méthodologique des sciences biologiques et humaines, qui trouvent expression dans la recherche sur les E.M.I. "[1 p.412].

B.3.3.- Définition clinique des expériences de mort imminente.

  " Nous définirons une E.M.I. comme étant le récit subjectif de sujets, le plus souvent en état d'inconscience clinique, dont le score à l'évaluation de l'échelle de Greyson révèle un score supérieur à sept " [Tableau n°.1].

  L' échelle de Greyson est actuellement le seul moyen d'évaluation clinique dont la validité et la fiabilité ont été testées [1 p.15, 170].

Tableau n°.1

Echelle d'évaluation clinique de GREYSON

Questions

Réponses

Nbre de points

1. Le temps vous semblait-il s'écouler plus rapidement ?

- Non

0

- Temps plus rapide qu'habituellement

1

- Tout semblait instantané, le temps était stoppé

2

2. Pensiez-vous plus rapidement ?

- Non

0

- Plus rapidement que d'habitude

1

- Incroyablement plus vite

2

3. Avez-vous revu des scènes de votre passé ?

- Non

0

- Je me suis rappelé de plusieurs scènes

1

- J'ai revu des scènes de mon passé sans les contrôler

2

4. Vous a-t-il semblé tout comprendre ?

- Non

0

- A propos de moi et tous les autres

1

- A propos surtout de l'univers

2

5. Avez-vous ressenti un sentiment de paix ou était-ce plaisant ?

- Non

0

- De calme

1

- une pais, un bonheur incroyable

2

6. Avez-vous ressenti un sentiment de joie ?

- Non

0

- Heureux

1

- Une joie incroyable

2

7. Avez-vous ressenti un sentiment d'harmonie ou d'unité avec l'univers ?

- Non

0

- Plus de conflit avec la nature

1

- unité, faire " un " avec le monde

2

8. Vous êtes-vous senti entouré ou avez-vous vu une lumière brillante ?

- Non

0

- Inhabituellement brillante

1

- Lumière surnaturelle ou mystique

2

9.Vos sens étaient-ils plus vifs qu'habituellement ?

- Non

0

- Plus que d'habitude

1

- Incroyablement plus

2

10. Vous a-t-il semblé être conscient d'événements se produisant ailleurs comme par une perception extrasensorielle ?

- Non

0

- Oui, mais les faits n'ont pas été actuellement vérifiés

1

- Oui, et les faits ont plus tard été vérifiés

2

11. Avez-vous vu des scènes du futur ?

- Non

0

- De mon futur

1

- De l'avenir du monde

2

12. Vous êtes-vous senti séparé de votre corps physique ?

- Non

0

- J'ai perdu conscience de mon corps physique

1

- J'ai clairement quitté mon corps et existé à l'extérieur de lui

2

13. Avez-vous eu l'impression de pénétrer dans d'autres mondes surnaturels ?

- Non

0

- Des endroits non familiers ou étrangers

1

- Clairement mystique ou surnaturel

2

14. Avez-vous eu l'impression de rencontrer une présence mystique ou un être mystique ?

- Non

0

- Une voix inidentifiable

1

- Une voix ou un être défini comme clairement mystique ou surnaturel

2

15. Avez-vous vu des esprits de personnes décédées ou de personnages religieux ?

- Non

0

- J'ai senti leur présence

1

- Je les ai vu

2

16. Avez-vous eu l'impression d'arriver à une frontière ou à un point de non retour ?

- Non

0

- J'ai pris la décision consciente de retourner à la vie

1

- Il y avait une barrière que je n'étais pas autorisé à franchir, ou, je me suis senti retourner à la vie involontairement.

2

B.4.- SUJETS RELATANT UNE EXPERIENCE DE MORT IMMINENTE

B.4.1.- Epidémiologie

B.4.1.1.- Fréquence des E.M.I.

  Il n'existe pas en France d'étude nous donnant des statistiques sur la fréquence des E.M.I. Les enquêtes prospectives ne sont pas possibles, sous couvert du secret médical.

  Le seul sondage significatif fait, l'a été aux Etats-Unis par l'Institut Gallup [1, 48]. Il donne une fréquence de 35 % de recits d'E.M.I. parmi les rescapés d'une mort clinique ou d'un coma profond dans la population américaine [28 p.343].

B.4.1.2.- Facteurs déclenchants

- Situations propres à générer un stress important, brutal (accidents),

- Situations propres à provoquer des hypoxies ou des hypercapnies (arrêt cardiaque, chirurgie, maladies),

- Toute situation susceptible de produire un état de conscience modifié comme citées en B.3.1. et differenciées de B.4.2.

B.4.2.- Diagnostic différentiels

  Voici les principarux diagnostics différentiels recueillis [1, 7, 10].

- Description du champ de conscience et état de conscience pathologique :

- Epilepsie temporale,

- Dépersonnalisation,

- Héautoscopie hallucinatoire,

- Psychose délirante Aiguë (hallucinations visuelles, auditives, olfactives, somesthésiques,

- Schizophénie et pertes des limites corporelles,

- Ivresse psychédélique

- Isolement sensoriel.

- Conscience onirique : les rêves.

B.4.3.- Les E.M.I. en milieu hospitalier

  Toute personne subissant une intervention chirurgicale, venant de subir une réanimation suite à un arrêt cardio-respiratoire est susceptible de relater un récit d'expérience de mort imminente [1, 7, 10].

  Toute personne victime d'accidents traumatiques, ainsi que les personnes ayant fait une tentative de suivide [46].

  Mais les cas d'E.M.I. en milieu hospitalier, bien que ce lieu semble en être un réservoir important, sont difficiles à trouver. Car, comme nous le verrons en analyse, il y a autocensure de l'expérienceur face à la peur de la réaction du personnel médical et paramédical.

B.4.4.- E.M.I. négative

  Ces expériences sont aux antipodes des sentiments de joie, de paix et d'amour éprouvés par la plupart des expérienceurs. Leur étude est très difficile tant nous manquons de cas et d'exemple.

  Ces E.M.I. plongent le sujet dans un monde obscur ou refermé sur lui-même avec des visionsd'enfer et de terreur. C'est du moins ce que nous rapporte Jean, dont l'expérience s'est déroulée durant une séance de méditation :

  " ...j'étais sur cette pente où une porte béante s'ouvrait sous mes pieds, le moindre mouvement me faisait glisser un peu plus. Je me retenais au sol et à ce que ma main trouvait pour ne pas tomber dans ce trou. J'y ai vu le visage d'une femme Hindoue aux yeux... blancs, livides. Elle venait pour m'attraper et j'ai vu... ce qu'il y avait derrière elle : l'enfer !

  Dans ce trou infini et noir, je sentais des milliers de personnes qui tentaient de remonter la pente vers la pente. Chaque centimètre grimpé l'était au prix d'efforts inhumains ; à peine ces centimètres gagnés, quelqu'un vous marche sur la tête ou vous agrippe par la cheville, vous faisant redescendre, comme ça, tout le temps, éternellement, dans cette fournaise. J'ai vu l'enfer... "

  Il est à noter que Jean nous a clairement exprimé sa terreur tout autant que les autres témoins ont pu faire partager leur sentiment de joie.

  C'est le seul témoin d'E.M.I. négative que nous ayons rencontré. Mais leur discrétion semble tout autant liée à la difficulté de parler de son E.M.I. que leur expérience fait sans doute appel à des composantes individuelles que seul le témoin est capable de décoder pour l'instant, tant qu'il accepte de voir son expérience, comme nous l'avons relevé dans l'exemple de Jean, qui rajoute :

  " ...mais je sais à quoi correspond mon expérience en partie. Je sais que c'est une partie de moi que j'ai rencontré... "

B.4.5.- E.M.I. d'enfants

  Les cas d'E.M.I. d'enfants sont intéressants. Au moins à un égard : on ne peut les " accuser d'affabulations, de constructions imaginaires, de projections conditionnées par apprentissage... " [48 p.127].

  Quand bien mêmenous pourrions taxer les enfants d'imagination productive, il est un cas - entre autres - particulièrement signifiant (et sur lequel nous reviendrons) : celui d'Emmanuelle.

  Victime d'un accident de la voie publique à dix ans, Emmanuelle dû subir l'évacuation d'un hématome sous-frontal au bout de 6 jours de coma.

  Durant cette période d'inconscience, Emmanuelle sortait de son corps, se promenait dans l'hôpital et dans la rue. Dans ses déambulations, il lui arrivait de traverser les gens, de voir leur intérieur et de savoir ce qu'ils pensaient.

  Réveillée le matin par une " espèce de lumière, qui vient on ne sait d'où, comme un soleil, très jolie : elle m'aidait à me réveiller, à aller dans la bonne voie. Je l'ai vue avant ma sortie hors du corps. Elle était à côté. Elle partait de temps en temps " [48 p129].

  Au réveil de son coma, la réalité était plus dure, il y avait la rééducation. Et ce n'est que deux ans et demi plus tard qu'elle en parla à sa mère, dans l'intimité de la salle de bain.

  Elle en parla aussi à l'école où " on se moque de moi et on me prend pour une folle à cause de cet accident ".

  D'autres observations d'E.M.I. d'enfants ont été faites par un pédiatre, Melvin MORSE citant le cas d'expérience vécue à six et neuf mois.

  C'est plus souvent rétrospectivement que les enfants parlent ou se souviennent de leur E.M.I. Tout dépend de la manière dont il aura intégré son expérience face à la réaction de son entourage.

B.4.6.- E.M.I. et tentatives de suicide.

  L'intérêt des E.M.I. dans les tentatives de suicides est représenté non pas par son aspect facteur déclenchant d'E.M.I., mais par son aspect curatif de récidive de T.S.[46]. Ce qui peut sembler d'ailleurs paradoxal. Pourquoi une personne qui voulait mourir, après avec connu ce bonheur ineffable ne cherche pas à y retourner aussitôt, même plus tard ?

  " Cela ne peut s'expliquer que le désir de vivre " [48 p.140]

  Les suicidants ayant vécu une E.M.I. reviennent de leur expérience plus souvent soulagés d'avoir raté leur coup et remercient Dieu de leur avoir donné la chance et la possibilité de repartir sur de bonnes bases [48 p.140].

  Voici les douze répercussions dissuasives de récidive, selon Bruce GREYSON :

  " 1. La " fusion cosmique " : c'est le sentiment de faire désormais partie d'un tout qui dépasse l'individu. La sensation d'être en harmonie avec la nature, ou partie intégrante de l'univers, bien plus qu'avant l'E.M.I.

  2. Le " désinvestissement " des échecs et des pertes : l'E.M.I. permet de relativiser les problèmes qui ont pu conduire au suicide .Les problèmes n'ont plus le même sens.

  3. La revalorisation de la vie : la vie leur paraît désormais avoir plus de sens, de valeur, de prix , de saveur : ils savent mieux en jouir.

  4. La reconnaissance de la vie : la vie leur semble plus réelle qu'avant : ils se sentent revivre, ou vivre pour la première fois.

  5. Une meilleure image de soi : sens accru de la dignité personnelle, du respect de soi...

  6. " L'attachement symbiotique " : le rescapé a le sentiment qu'un lien l'unit à tous les autres...

  7. Le fatalisme : le escapé comprend que son " heure n'était pas venue ", ou qu'il a voulu forcer le destin, ou que de toute façon, la mort ne pouvait être une échappatoire.

  8. Réexamen et bilan plus positif de l'expérience personnelle : les expérienceurs rapportent que leur " passage en revue " de leur vie au cours de l'E.M.I. les a aidés à résoudre l'anciens conflits...

  9. Amélioration de fait de la situation personnelle (bénéfice secondaire de la N.D.E.) : les témoins croient à la résolution de leurs problèmes comme un effet de l'expérience.

  10. L'impératif moral : l'expérienceur a la conviction que le suicide était une faute morale, qu'il aurait dû être puni pour s'être donné la mort, ou que d'autres auraient pu en souffrir.

  11. Le sacrifice de l'ego : il consiste à amputer le moi de ses comportements indésirables ou repoussants, afin de lui permettre de continuer à fonctionner. L'E.M.I. est ainsi perçue comme une forme de compromis thérapeutique entre le désir de mourir et celui de continuer à vivre, où le fait d'avoir frôlé la mort apparaît comme une punition suffisante en soi pour apaiser toute culpabilité.

  12. Enfin, la douzième raison de continuer de vivre, c'est la peur de devoir en passer par là de nouveau, la peur de l'expérience, trop effrayante, bouleversante et douloureuse.

  Les six premières raisons sont d'ordre transcendantal, les six autres sont plutôt d'ordre pragmatique.

  Si les E.M.I. donnent une vision romanesque de la mort, elles en font autant pour la vie, à laquelle elles donnent un sens et une valeur. Ce qui fait que les gens choisissent de vivre, c'est une vision transpersonnelle de la vie et de la mort [40, 44].

  Ces données sont de nature à nous interroger sur la validité de nos thérapies ayant comme finalité de restructurer l'ego. Aider les suicidaires à trouver un sens et un but à leur vie est plus utile que de leur apprendre à supporter le quotidien [48 p.142].

B.4.7.- Contenu et thèmes retrouvés dans les récits d'E.M.I.

  La liste des thèmes n'est pas exhaustive, elle peut encore être détaillée et précisée. Plus un th_me est précis, plus il est facile de l'évaluer.

1 La reconnaissance d'être mort :

  Deux approches s'ouvrent à nous :

  Soit le sujet a conscience de l'événement irrémédiable mettant sa vie en jeu, auquel cas nous sommes dans le même contexte psychologique de la personne en fin de vie qui sait qu'elle va mourir.

  Soit le sujet est déjà inconscient, et a postériori, au retour, déclare avoir su qu'il était mort. Comment peut-on déclarer que l'on était mort alors que la personne semble coupée de toute relation avec l'environnement ? Ces cas sont actuellement le fait des E.M.I.

2 L'expérience de sortie hors du corps (S.H.C.)

  La sortie hors du corps est aujourd'hui un phénomène bien connu [1, 7, 10, 19, 48].

  En vulgarisant, être hors de son corps c'est avoir un deuxième corps qui est au dehors du corps physique.

  " Ce corps observe le monde ordinaire à partir d'endroits inhabituels ou impossibles pour le corps physique.

  La première observation concerne le corps physique, d'une position généralement élevée ".

  Ce second corps, ou double, possède des fonctions d'observation, de perception, de communication et de déplacement qui lui sont propres [48 p.94-95].

3 Le tunnel

  La traversée [52] de Philippe LABRO fait référence à cette zone de transition. Le tunnel est un lieu où l'on monte ou l'on descend.

  Selon l'étape de l'E.M.I., le sujet séjourner plus ou moins dans cet endroit qui est parfois le lieu de rencontre d'entités de lumières (plus souvent au bout du tunnel), de personnes décédées, mais aussi de formes et d'esprits. Ainsi s'engagent parfois des conversations dans " l'au-delà " que nous rapportent ensuite les témoins.

  Au bout du tunnel se trouve " la lumière ".

  Bernard WERBER [53], dans son roman " Les Thanatonautes ", le désigne comme un lieu de transit pour ceux qui viennent de mourir. Ce qui est aussi relevé dans la tradition tibétaine et de l'Egypte antique [7, 14, 25].

4 La lumière

  Ou l'Amour et la Connaissance.

  Ce sentiment est fréquemment exprimé par les sujets qui ont rencontré la lumière. Cette lumière est puissante, plus forte que le soleil mais n'aveugle pas, on peut la regarder. Elle est douce et chaleureuse, pleine d'Amour et provoque un sentiment de paix, de joie.

  Pour les témoins qui se sont fondus à la lumière, l'expression du ressenti de cette osmose est indicible. Les mots manquent pour exprimer l'ineffable.

  " Dès que je msuis fondu à la lumière que j'ai rencontré, c'est Dieu qui était en moi. Je n'étais qu'Amour, je faisais Un avec l'univers. Il n'y avait plus de questions, qu'une plénitude infinie, hors de l'entendement ", nous dit Louis. Lorsque les sujets se fondent à la lumière, ils sont souvent amenés à réaliser une expérience de type extatique (comme l'exemple de Tony en A.2.), mystique. Ils nous déclarent que le vocabulaire existant n'est pas suffisant pour décrire l'Amour, la plénitude, cette lumière douce et puissante, cette symbiose qu'ils ont vécue avec l'univers. " Faire Un avec le Tout " [9].

  " Dans la bible, nous confie Louis, il y a plus puissant que le secret de l'atome, il y a infiniment plus abondant que toutes les richesses de la terre. Ce 'est ni un pouvoir ni un savoir. C'est une connaissance intime de l'homme et de l'univers, objet d'une relation perdue entre l'Homme et Dieu. Il y a la LUMIERE. La lumière est là pour nous en éclairer... ".

  Cette référence biblique de Louis est la constatation à laquelle il est parvenu : qu'Il n'y a QUE ce livre qui parle aussi bien de la lumière d'une manière aussi universelle ".

  Cette référence est souvent utilisée par les témoins mais n'implique pas de leur part une adhésion à une religion ni à des pratiques religieuses.

  Cette lumière d'Amour est vivante, pensante, douée de sentiments, capable d'humour.

5 L'évaluation de la vie ou mémoire panoramique

  Totale ou partielle, les sujets revoient certaines parties de leur vie, d'événements les ayant marqués ou d'autres oubliés ou encore dont ils n'avaient pas mesuré l'importance.

  Cette " revue de vie " peut être spontanée, faire suite à une réflexion personnelle ou bien être induite suite à la rencontre d'une entité ou de l'être de lumière. Après, s'imposent des conclusions personnelles au sujet, parfois motivant son retour, parfois lui donnant la compréhension, le sens de ce qu'il a vécu.

  Ces moments sont revus " détachés ", comme si le sujet était à côté de ce qu'il a vécu, lui permettant une objectivation sans sentiments coupables ni a priori.

6 Les mondes et entités rencontrées

- Les entités rencontrées :

- La lumière elle-même est perçue comme un être pendant. Il ne peut être question d'intelligence puisque cette lumière est Amour et Connaissance, Un avec l'univers, ce qui est bien au-dessus du fait du concept de l'intelligence. Il s'agit, de propos d'expérienceur " d'une entité planétaire, cosmique " [9].

- Les êtres de lumière. Ils sont souvent perçus comme des anges, des guides. Ils sont souvent vêtus de vêtements blancs, rayonnant de lumière, ceint d'une ceinture dont la couleur varie d'un personnage à l'autre (bleu, or...).

  Il peut s'agir aussi de Jésus Christ, Marie et/ou d'autres personnages spirituels, dont les échanges de communications varient d'un témoin à l'autre [9].

- Les rencontres de personnes décédées sont plus fréquentes. Il s'agit souvent d'un défunt récent ou avec lequel le sujet entretenait des liens étroits. Ici, se pose le cas de témoins ayant vu un parent ou un personnage (un frère ou une sœur) décédé avant leur naissance. Comment peuvent-ils les reconnaître lorsque ces personnes décédées ont été tenues secrètes dans l'histoire de la famille [9, 48] ?

- Les mondes visités :

  Ce sont des mondes transcendants et les mots manquent pour les décrire. Les lieux les plus visités sont :

- Paysages, vallées, montages à la beauté surnaturelle. Harmonie des sons " cristalins... jamais entendus sur terre ", féérie et enchantement des couleurs allant jusqu'à se " trouver en contemplation ".

  Quelques témoins rapportent avoir vu des " cascades d'eau d'une beauté infinie ", senti des parfums voluptueux. Mais le vocabulaire reste faible et ne traduit pas l'émerveillement et le ressenti des témoins.

- Les cités célestes sont brillantes, étincellantes comme du pur cristal, éclairées en permanence par une lumière qui irradie de partout (la cité elle-même est lumière). Leur architecture est inconnue sur terre. La beauté, la paix, l'ammour sont les attributs de ces cités.

7 Le retour

  Le retour est souvent le fait d'une décision personnelle (revenir à la vie pour : un être cher - enfant, parent -, terminer une œuvre ou une mission non accomplie) [9, 48], il peut être aussi le fait d'une obligation comme nous l'avons vu avec Tony.

  Le retour dans le corps est le plus souvent vécu comme une sensation désagréable. Le corps est lourd, étroit, étriqué à côté des sensations quiviennent d'être ressenties. On peut retomber dedans d'un coup ou bien l'enfiler comme un gant. Parfois le retour est inconscient.

  Les modalités du retour ne sont pas forcément en lien avec les modalités du départ.

8 Les perceptives : du corps, de l'espace, du temps.

  Les perceptions du " corps second " [20] sont liée à sa nature comme nous l'avons vu dans les S.H.C.

  Cependant, les perceptions de l'espace et du temps sont modifiées. Il n'existe plus de temps, tout est atemporel. Les expérienceurs vivent un " ici et maintenant " permanent, infini. Il est possible d'avoir accès à des moments du passé ou du futur, mais peu y ont accès [48].

  Il est intéressant de noter que les témoins relatent un rapport au temps transformé suite à leur expérience. Il vivent moins dans les contraintes temporo-spatiales pour mieux se laisser transporte par l'ici et maintenant [44]. De plus, la plupart expriment la naissance d'un attrait particulier pour les questions de la relativité du temps, pour les nouvelles théories et conceptions de l'espace-temps [13, 30, 45].

  C'est en fait assez curieux comme phénomène. Peut-on établir une relation entre les perceptions extrasensorielles des E.M.I. et les théories d'univers parallèles, bulles, multiplans décrits par les physiciens au travers de la mécanique quantique [38].

  Il est d'ailleurs intéressant de noter à quel point difficultés d'expliquer l'univers des E.M.I. et difficultés d'expliquer les univers de la mécanique quantique sont semblables [1, 38].

9 Le sentiment de réalité de l'expérience

  " Cela n'avait rien d'une hallucination... Et ce que je vous décris maintenant n'avait rien à voir avec ces hallucinations, absolument rien. " [48 p104].

  " Pendant que j'étais sorti de mon corps, j'étais littéralement stupéfait de ce qui m'arrivait : je n'y comprenais rien. Mais c'était réel. Je voyais mon corps si distinctement, et de si loin " [1 p.150].

  Les témoins vivent avec une grande authenticité eur expérience et la différentie bien d'un rêve ou d'un trouble quelconque. Ils n'ont aucun doute là-dessus. Pour eux, c'est une absolue certitude, ni rêve ni hallucination, ni trouble ni désordre psychologique. Pour les témoins, il est indéniable qu'ils ont vu et vécu quelque chose qui dépasse les possibilités de visualisation et de conceptualisation moyenne, hormis celui qui l'a vécu.

  Ainsi que nous le dit Serge : " nous n'avons pas besoin d'essayer de nous expliquer sur ce que nous avons perçu. Nous sommes " connectés " sur la même fréquence, celle qui englobent les autres. Ce qui nous épargne toutes ces explications... nous savons de suite de quoi nous parlons, instantanément. "

  Ce sentiment de réalité est très important pour le témoin, car de là, va naître la certitude que la mort n'existe pas [3, 9, 15, 33, 34, 48].

10 Incommunicabilité de l'expérience

  Comme nous l'avons vu précédemment, du fait de perceptions jusqu'alors inconnues de l'expérienceur, celui-ci doit, dans un premier temps, se resituer lui-même dans la réalité. Ces expériences font appel à des sensations jusqu'alors inexpérimentées, ils ont besoin d'ajuster leur nouvelle mesure d'échelle de valeur [1 p131].

 

  " Il n'existe aucun mot pour faire comprendre ce que j'ai vécu ".

 

  D'autant que la peur d'être pris pour un fou est très forte. Peur des réactions du personnel médical et paramédical, de l'entourage font que le témoin préfère ne pas parler de son expérience et tend à s'isoler. Ce qui va dans le sens contraire de l'intégration de son expérience.

B.5.- REPERCUSSIONS DES EXPERIENCES DE MORT IMMINENTE

B.5.1.- Répercussions liées aux sujets

  Les répercussions sont, d'un sujet à l'autre, plus ou moins prononcées et plus ou moins vécues difficilement. Elles sont le fruit d'observations de plusieurs milliers de témoignages d'E.M.I. [26 p.73].

  " Avant, j'étais matérialiste. Je n'avais de préoccupations que pour moi, mon boulot, ma voiture et mes femmes. Maintenant, c'est différent. Complètement même... J'ai changé d'emploi, j'étais assureur (rire). J'ai réussi à me marier et j'ai deux adorables petites filles... Si quelque chose ne me préoccupe plus ; c'est bien demain... Je me sens plus en harmonie avec la nature " nous déclare Louis.

  Elles sont des deux ordres :

B.5.1.1.- Répercussions physiques et physiologiques

  Kenneth RING en [26 p.131, 48 p.113] décrit un syndrome de " sensibilité à l'électricité " après les E.M.I. comportant :

- une augmentation des phénomènes de sensibilité de type allergique,

- une amélioration de l'acuité auditive,

- des troubles disthymiques (troubles de l'humeur),

- une augmentation des capacités paranormales et dons de guérisseurs.

B.5.1.2.- Répercussions psychologiques

  Voici ce que les sujets rapportent fréquemment après une E.M.I. :

  Transformation de la personnalité et de la mesure des valeurs :

  Avoir pris conscience du caractère sacré et unique de toutes vies. Cette meilleure appréciation du caractère précieux de la vie est rapporté aussi par les patients rescapés de tentatives de suicide. (Le cas des rescapés de tentatives de suicide mérite un chapitre à lui seul tant il ouvre de questions et de perspectives d'inférence sur les soins en psychiatrie) [46].

  Les sujets apprécient, de plus, le caractère temporaire de leur vie sur terre. Ils expriment fréquemment le besoin de vivre plus intensément " au jour le jour ", pour profiter pleinement [26 p.150].

  Ils expriment souvent une sensation de renaissance. Le retour à la vie justifie souvent le sentiment d'avoir un nouveau destin ou se sentent investis d'une mission.

  Est aussi notée une amélioration de l'estime de soi. Ils expriment fréquemment un regain d'intérêt pour les valeurs telles que l'amour des autres, le respect de la nature, les valeurs spirituelles, la connaissance et l'étude, associé à un désinvestissement des valeurs matérielles tel que l'argent, la possession de biens matériels, le statut social, le pouvoir sur autrui.

  Nous relevons aussi une transformation de la religiosité et de l'état d'esprit face à la mort. Il est fréquemment rapporté par les sujets une disparition de la peur de la mort, une croyance en une vie après la mort, sans que cela enlève à l'appréhension des circonstances de la mort à venir [26 p.159].

  Ces répercussions sont à associer à celles développées par Bruce GREYSON dans son étude sur les répercussions des E.M.I. chez les suicidants [46].

B.5.2.- Difficultés d'intégration des E.M.I. dans le vécu des sujets

  Les difficultés d'intégration de cette expérience " hors du commun " dans la biographie du sujet semblent bien réelles et majorées par l'incommunicabilité ressentie de l'E.M.I., qui succède fréquemment à la crainte de réaction de rejet et d'incompréhension de l'entourage, comme nous l'avons vu précédemment, et accentuant le sentiment d'isolement du sujet [40, 41, 46].

  Ces problèmes d'intégration de l'expérience peuvent entraîner une difficulté de réadaptation du sujet à son existence quotidienne (problème de relation au temps, difficultés d'intégration des règles sociales, difficultés à identifier " l'amour " à un objet véritable).

La difficulté pour les sujets d'E.M.I. est donc d'intégrer dans leur quotidien toutes ces nouvelles dimensions. " Cela revient à changer de culture du jour au lendemain ". Intégrer son expérience c'est : " avoir de nouveau des relations familiales normales, ne pas chercher à revivre son expérience et ne pas se prendre pour un missionnaire " (M.A. Descamps, Pr de psychologie sociale à l'université René Descarte, Paris. [33].

  Face à ces difficultés, que peut rencontrer le sujet d'E.M.I., ce dernier étant amené à un processus de repli sur soi, va manifester ses difficultés. Les troubles de l'ajustement qui en sont une manifestion [1 p.315], sont définis et classés par le DSM III R comme suit :

A.- une réaction non adaptée à un stress psychologique, survenu dans les trois mois suivant ce stress,

B.- une réaction non adaptée est définie par chacun des deux critères suivants :

- une altération des occupations ou des fonctions sociales,

- une symptomatologie dépassant le cadre des réactions normales et prévisibles,

C.- ce trouble ne correspond pas à des cas répertoriés de fortes réactions au stress.

D.- ce trouble disparaît lorsque le stress cesse ou... lorsqu'un nouveau niveau d'adaptation est obtenu.

  La recherche de ces signes peut être indiquée chez toutes les personnes ayant vécues :

- un coma,

- un arrêt cardiaque,

- un traumatisme sévère.

  Si un niveau de satisfaction n'est pas atteint ou qu'une situation bloquée perdure, le témoin peut glisser vers un syndrôme dépressif atypique chronique [1 p.315]

  Aux vues de ces différents éléments, nous avons donc reformulé notre hypothèse transitoire comme suit : " L'infirmier, dans le cadre d'une relation d'aide, pourrait permettre à un sujet d'E.M.I. de mieux intégrer son expérience ".

B.5.3.- HYPOTHESE DEFINITVE

" L'infirmier, dans le cadre d'une relation d'aide, pourrait permettre à un sujet d'E.M.I. de mieux intégrer son expérience ".


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