N.D.E. ( Near Death Experience )
E.M.I. ( Expériences de Mort Imminente )


Présentation générale



Au cours des 30 dernières années, des témoignages de milliers de personnes de toutes nationalités, âges, religions, professions, ont été recueillis par des professionnels de santé, psychologues, sociologues, anthropologues, etc. Expérience accessible aux autres seulement à travers le récit qui commence quasi-invariablement par " il n'y a pas de mots ". Cet " au-delà " des mots renvoie également, selon les témoins, à une " dimension " hors du temps et de l'espace.

 

Introduction

NDE : expérience vécue dans des circonstances de mort imminente.

Le sujet peut penser qu'il est mort, mais comme il revient pour le raconter, on ne peut considérer qu'il a été réellement mort, même si un état de mort clinique et cérébrale a pu être observé et constaté par les instruments.

Mais les circonstances de mort imminente ne sont pas les seules où ce type d'expérience peut survenir. Certains éléments qui constitue la NDE peuvent se retrouver dans des Etats Modifiés de Conscience (EMC), à partir d'un état de veille, sommeil, ou intermédiaire. Exemple : Expérience Hors du Corps (EHC ou OBE pour Out of Body Experience), rêves lucides (ou éveillés), extase mystique, transes, éveil de kundalini (énergie vitale, ki, chi), satori, samadhi, etc.

Environ 30% des personnes qui ont frôlé la mort, soit par accident, soit par maladie, rapportent un récit de NDE, selon des enquêtes américaines. Mais l'expérience peut survenir par peur de la mort : avant un accident. On recueille beaucoup plus de témoignages ces dernières années grâce notamment aux techniques de réanimation cardio-respiratoire et aux capacités d'interventions rapides des secours. Mais les récits remontent à l'Antiquité (Platon : mythe d'Er). Des rapprochements ont été effectués avec les descriptions tirées des " Livres des morts " tibétains et égyptiens.

 

Phénoménologie

Sensations/impressions

- Sortie du corps (décorporation, OBE) : le " moi ", ou le " je " est situé hors du corps. Il peut voir, entendre et se déplacer. Sensations de surprise, mais surtout de paix, de bien-être et de familiarité. Sentiment de réalité très fort : " plus fort " que réalité ordinaire. Sensation de compréhension et d'unité de toutes choses.
- Déplacement dans espace long, sombre, circulaire de type tunnel.
- Arrivée dans la lumière, associée à sentiment d'amour infini. Notion de transcendance, au-delà de la réalité ordinaire.
- Déplacement dans, ou " apparition " de, lieux et paysages " merveilleux ", baignés de lumière. Rencontre d'entités (êtres de lumières, anges, proches décédés).
- Revue de vie, complète et " instantanée ", avec évaluation émotionnelle des actions, surtout de détails oubliés.
- Décision de retour, prise ou imposée/suggérée.
- Réveil brutal dans le corps ou chemin inverse.
- Transformation de la personnalité, plus altruiste et moins matérialiste, perte d'angoisse devant la mort, développement de la spiritualité " non-religieuse ", éventuellement capacités paranormales (voyance, télépathie, etc.).

 

Analyse

Sensation de paix et de bien-être contradictoire avec impression/certitude d'être mort. Absence de sensation d'écoulement du temps, et d'espace.

- Décorporation : Sensation d'avoir un corps (de lumière) ou non : point de conscience qui flotte. Souvent au plafond d'abord, puis se déplace et traverse les murs.
Perception d'objets. Des témoins ont pu décrire des appareils, des locaux, des numéros de série, même en étant arrivés inconscient à l'hôpital.
Ceci a été étudié en laboratoire avec des résultats mitigés : quelques cas de perception d'une cible, mais pas 100%. L'expérience hors du corps est décrite comme très difficilement contrôlable. En OBE, la réalité semble perçue " objectivement ", mais " déformée ", d'où parenté établie avec le rêve lucide. La moindre pensée " crée " une perception (on parle de forme-pensée), et le sujet change brutalement d'environnement comme dans le rêve.
Les personnes aveugles font des NDE avec perceptions visuelles.
La querelle est vivace quant à l'objectivité ou la subjectivité de l'expérience. Certains chercheurs proposent une dimension de la conscience ou les deux modes interfèrent, selon le degré de contrôle exercé. Méthode : yoga du rêve dans le bouddhisme tibétain.
Plusieurs niveaux de perception plus ou moins objective sont distingués dans l'hindouisme : différents niveaux de " vibration " correspondant au centre énergétique principal sollicité, le chakra, renvoient à différents " niveaux de réalité " (astral, mental, causal, etc.)
Perception extra-sensorielle : déplacement dans des pièces voisines ou déplacement lointain et instantané, perception de discussions, lecture automatique des pensées (télépathie).

- Le tunnel n'est pas toujours présent. Ce peut être un sensation de déplacement, en direction d'une lumière qui grandit.

- Lumière : " plus puissante que mille soleils ", mais pas aveuglante. Lumière = amour, sagesse. Sensation de faire UN avec toutes choses. Egalement en décorporation : impression d'être l'objet qu'on observe (ex : l'herbe au bord de la route, ou une feuille sur un arbre).

- Sons : peuvent précéder la NDE, sons cristallins, " musique des sphères ", sons " angéliques ", d'une grande beauté.

- Parents ou proches décédés : accueil, grande joie, retrouvailles, mais souvent le message " il est trop tôt " vient d'un proche. Le bouddhisme tibétain prétend ici que ces proches devraient être déjà réincarnés, et qu'il s'agit donc de " projections inconscientes ".

- Entités : personnifiées ou non : Christ, Bouddha, Ange, Guide, etc. Ou " être de lumière ", visible ou non : " Présence ", c'est la lumière qui s'exprime. Communication de type télépathique.

- Panorama, ou revue de vie : Souvent amenée par une question de type : " Qu'as-tu fait pour servir ? ". Le panorama de vie commence à la naissance et donne tous les détails, souvent " insignifiants " (au moment du vécu), avec les sentiments associés à chaque action. Le sujet revit ses sentiments et émotions mais aussi ceux des personnes impliquées dans le souvenir. Exemple : souffrance ou peine infligée à autrui. Il n'y a aucune sensation de durée : la revue est instantanée. Pas de notion de jugement, mais plutôt auto-évaluation, dans une optique d' " amour-service ".

- Retour : la décision est prise ou suggérée, voire " imposée ". Le sujet pense par exemple à ses enfants, à sa famille. Sentiment d'une tâche à accomplir (amour-service), mais pas forcément de voir de " raconter ". Une 2ème chance est donnée, pourquoi ?

- Personnalité : changement de la vision du monde, abandon des valeurs matérialistes, argent, réussite, etc. Ou transformation radicale : mutation. Mais pas abandon de la vie en société pour l'ascétisme. Le sujet apprécie la beauté des choses simples, la nature, etc. " Religiosité " modifiée. Tendance à rejeter les dogmes. Développement d'une spiritualité " panreligieuse ". Le souvenir de l'expérience reste vivace, mais la compréhension de son sens, qui semblait évidente, s'estompe. La conscience semble " étriquée " au retour.
Très rarement : NDE négative de type cauchemardesque, perceptions d'entités néfastes, etc. Rare même chez suicidants. A noter que les suicidants NDE rejettent ensuite le suicide et retrouvent goût à la vie.

 

Recherche

Recueil de témoignages

Le souvenir de l'expérience n'est pas forcément immédiat. Peut survenir longtemps après, dans des circonstances qui facilitent sa survenue.
Première difficulté : mise en mots.
1er paradoxe : ils se croyaient mort et s'en réjouissaient (dans un premier temps). Combinaison d'extrême (Extra) lucidité et de consternation.
2ème paradoxe : comment décrire avec des mots : métaphores, symboles, adjectifs. Souvenir vivace, mais le récit transforme par nature, les mots trahissent. Beaucoup de témoins ont gardé le silence des années, par peur de passer pour fou. Refoulement éventuel de l'expérience, mais pas oubli.

 
Compréhension de l'expérience

Deux extrêmes :
1) Preuve de l'existence de l'Au-delà, de la survie de l'âme, de la conscience, ou même de l'existence de Dieu.
2) Hallucination. Overdose cérébrale de neurotransmetteurs. Anoxie. Position " officielle " de la médecine : trouble de nature hallucinatoire.

 
Approches

- ésotérique : voyage astral, autres dimensions, plans de réalité.
- spirituelle : Etat intermédiaire Bardo Thödol. Paradis (ou enfer) chrétien.
- psychologique : expérience du soi, enstase vs extase
- psychanalytique : l'inconscient crée l'expérience, on se croit mort donc on pense rencontrer des défunts, voir la lumière, etc.
Les récurrences valident-elles la théorie de l'inconscient collectif de Jung?
- neuro-psychiatrique : hallucination

 
" Rationalité "

En théorie, ces approches sont graduées dans le sens d'une rationalité croissante, mais les questions " qu'est-ce qu'une hallucination ? " ou même un rêve, sont loin d'être tranchées.
Hallucination = perception sans objet réel à percevoir (Henry Ey). Qu'est ce qu'un objet réel ? Discussion sur le réel et la perception du réel : physique quantique.

Hallucinogènes : LSD/ayahuesca/iboga, utilisés lors de rituels chamaniques en Amérique centrale, Afrique et Asie. NDE/OBE chimio-induite (kétamine), électro-induite (stimulation lobe temporal droit).
Comment le cerveau peut-il produire un état de conscience (subjectivement) plus " performant " (lucidité, compréhension) alors qu'il est quasiment hors-service (anoxie) ?
Parenté des NDE avec transes chamaniques, rêves des aborigènes (" vivent leurs rêves "). Yoga du rêve dans bouddhisme tibétain : le développement du corps de songe permet de voyager dans autre dimension, mais l'OBE est un effet secondaire, non recherché. Le méditant vise les dimensions supérieures (mentales, causales, etc.)
La thèse de l'hallucination n'épuise pas la question : pourquoi la nature a-t-elle " prévu " ou " développé " un dispositif pour adoucir la transition vers le néant ? Quel est le sens de l'expérience de sortie du corps ? Pourquoi cette expérience est-elle associée à des sentiments mystiques et aux notions d'amour, de lumière, même chez des athées convaincus ?

 
Problème culturel

Occident rationnel : de la culture scientifique au culte de la science. Est irrationnel ce qui échappe non pas à la raison mais à la science...
La remise en question des modèles est difficile. Le mystère surgit au milieu de la plus haute technicité : unités hospitalières de soins intensifs. Le choc conduit souvent au rejet des témoignages. Ecoute plus difficile auprès des médecins que du corps infirmier qui est en première ligne mais manque de formation/information.

Les NDE confortent l'espérance en une forme de survie de la conscience mais l'évocation publique du questionnement métaphysique et des interrogations spirituelles reste difficile, et du ressort d'un cheminement personnel.

NDE renvoie science et religion dos à dos. Les deux ont des choses à dire sur la question, mais aucune ne détient la vérité, que le sujet a eu le sentiment d'approcher, d'avoir goûté, mais n'en reste que le souvenir.

 
Pistes de recherche

Neurologie : discipline jeune (50 ans).
Neurosciences : de neurobiologie à psychanalyse. Sciences " dures " et " humaines ".
Travaux sur la conscience : modèle actuel bâti sur l'analogie théâtrale. La conscience est une scène avec un faisceau de lumière sur l'objet de l'attention. Les coulisses sont assimilées à l'inconscient.
Inconscient : perception subliminale, inconscient cognitif (traite l'information à niveau préconscient). L'inconscient est " intelligent et autonome " : à rapprocher des notions d'intuition, de synchronicité...

L'approche pluridisciplinaire est indispensable: psychologie, biologie, physique, etc.
Parapsychologie : sur l'aspect OBE
Plusieurs théories ont tenté de rendre compte de ces phénomènes.
Régis Dutheil : la conscience est constituée d'un support physique, les tachyons, qui sont des particules plus rapides que la lumière et forment un univers " réciproque " à l'univers physique.
Autres modèles : David Bohm (ordre impliqué), Bernard D'Espagnat (réel voilé).
Travaux de Bohm avec Karl Pribram sur la perception holographique.

 

Jocelyn MORISSON : Iands-France Toulouse